Les fruitiers rares |
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Article publié en 2003. |
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Le Plaqueminier du Japon (Kaki)
V.-A. Evreinoff, professeur à l'Institut Agricole de Toulouse et directeur scientifique de la Station d'Arboriculture de La Flambelle, a publié cet article dans la revue Fruits d'Outre-Mer, vol.3, n° 4, pages 124 à 132, 1948. Il traite du Plaqueminier du Japon (Diospyros kaki Thunb.) sous tous ses aspects : intérêt de l'espèce, origine et propagation, caractères botaniques, composition chimique du fruit, influence de la pollinisation sur l'abondance et sur les propriétés des fruits, variétés (classification et description), multiplication, culture (exposition, sol, plantation, soins, taille, cueillette, conservation, parasites et maladies). En hommage à l'auteur, l'article a été illustré par des photographies de François Drouet et de ses correspondants (crédits dans l'article). François Drouet a ajouté quelques notes qui complètent ou actualisent les considérations, déjà très étoffées, de V.-A. Evreinoff.
INTÉRÊT DE L'ESPÈCE
En Chine et au Japon, le Kaki ou Plaqueminier du Japon est l'arbre fruitier le plus répandu. Ses fruits fournissent la nourriture de la plus grande partie de la population. Durant ces dernières années, il a pris une certaine extension aux Etats-Unis d'Amérique. Cela prouve que le Kaki est un arbre fruitier précieux qui mérite une grande attention. En France, le succès de ce précieux arbre fruitier a été compromis par la médiocrité des variétés introduites dans les jardins ; c'est pourquoi j'ai été amené à attirer l'attention des lecteurs principalement sur la question du choix des variétés et sur leur description. Les fruits du Kaki, frais ou en conserve, sont très nutritifs et d'un goût agréable. Par leur richesse en vitamines, ils égalent les mandarines ; par leur richesse en sucre, ils sont supérieurs aux poires, aux pommes, aux pêches, aux prunes et aux abricots. A maturité, le Kaki du Japon contient 20 % de sucres sous forme de mannosaccharose. La fertilité du Kaki est extraordinaire : des arbres de la variété Hachiya, en Californie, donnent jusqu'à 150 kg par pied ; les jardins de 80 à 100 arbres donnent de 8 à 8,5 tonnes de fruits ; un hectare en donne jusqu'à 30 et 35 tonnes. Ces exemples acquièrent une importance particulière si l'on tient compte de la grande teneur des fruits du Kaki en matière sèche, jusqu'à 40 %, dont presque la moitié est facilement assimilable par l'organisme sous forme de sucre. Pour la dessiccation, le Plaqueminier du Japon est un fruit aussi précieux que la datte et la figue. En faisant un choix soigneux des variétés, la culture du Kaki peut devenir une culture de rapport pour de nombreuses régions de France. En France, la culture du Kaki du Japon est possible sur presque tout le territoire, à l'exception des contrées humides et froides du Nord-Ouest, du Nord, du Nord-Est, et des pays montagneux. Les contrées les plus favorables à la culture de cet arbre fruitier sont les suivantes : Roussillon, Sud-Ouest, Provence, Bas Languedoc, Vallée du Rhône, Côte d'Azur, Béarn, Limousin, etc. Les appellations du Kaki du Japon dans les divers pays sont les suivantes : au Japon, Kaki, ce qui signifie « fruit de choix » ; en Chine : Shi-Tze ; en Angleterre, aux Etats-Unis d'Amérique, en Australie, et dans les autres pays de langue anglaise : Oriental Persimmon ou Date-Plum (prune datte) ; en Allemagne : Dattelpflaume ; en Italie : Loto del Giaponne ; en France : Kaki ou Plaqueminier ; en Russie : Khourma.
ORIGINE ET PROPAGATION
Le Plaqueminier du Japon (Diospyros kaki Thunb.) pousse à l'état spontané dans la Chine du Nord. Les Chinois l'ont mis en culture il y a environ mille ans. Au Japon, il est cultivé depuis cent ans environ. L'immense quantité de variétés de Kakis du Japon prouve l'ancienneté de cette culture en Chine et au Japon. Ainsi, au Japon, on connaît 800 variétés, et en Chine, le nombre des variétés cultivées dépasse 2.000. En Chine, le Kaki occupe la première place dans la culture des arbres fruitiers. Il s'étend sur tout le pays, mais la principale région de sa production et de ses meilleures variétés se trouve dans les provinces du Nord de la Chine, telles que le Shan-Si, Shan-Tung, Ho-Nan, Chi-Li. Dans ces provinces, on trouve des contrées qui s'occupent exclusivement de la culture du Kaki. Importé de Chine au Japon, le Kaki s'est répandu rapidement dans tout ce pays et y est devenu l'une des principales espèces fruitières. En dehors du Japon et de la Chine, cette culture s'est largement répandue à travers les pays du Sud-Est de l'Asie où elle est devenue l'une des principales ressources alimentaires de dizaines de millions de personnes. De l'Extrême-Orient, le Kaki fut introduit en Europe et en Amérique. Les Européens ont fait la connaissance de ce fruit au XVIIe siècle ; mention en est faite pour la première fois par des moines jésuites qui ont voyagé en Chine, notamment le moine Ricci, en 1613. Introduit en Europe au commencement du XVIIIe siècle, le Kaki n'a cependant été cultivé en France comme arbre fruitier que sous la Restauration. Mais jusqu'à la deuxième moitié du XIXe siècle, on ne s'en est pas occupé sérieusement. Ce n'est qu'après 1870 que cette culture a acquis, très lentement, une certaine importance. En Italie, le Kaki s'est répandu seulement à partir de 1876, et à partir de 1894 en Algérie, où, grâce aux efforts du Docteur Trabut, cette culture a pris assez rapidement de l'extension. Mais, jusqu'à présent, en France et en Algérie, elle n'a pas acquis une importance industrielle. Dans les Etats-Unis d'Amérique, le Kaki s'est répandu depuis la fin du XIXe siècle et a pris rapidement une place notable dans les Etats du Sud et en Californie. Dans le seul Etat de Floride, on comptait 88.000 pieds de Kaki en 1927. Les Américains ont amélioré beaucoup de variétés et en ont introduit de nouvelles très sélectionnées. En Russie, notamment au Caucase, le Kaki est apparu en 1888. Actuellement, il est largement cultivé sur les bords de la Mer Noire, entre Batoum et Sotchi, ainsi que sur les bords de la Caspienne (Lenkoran) et en Géorgie, sous le nom de « Khourma ».
CARACTÈRES BOTANIQUES
Voir nouvel article, dans lequel les caractères botaniques décrits par V.-A. Evreinoff ont été transférés, et ont été enrichis par une certain nombre d'observations. Ils ont éré également illustrés de nombreuses photographies.
INFLUENCE DE LA POLLINISATION SUR L'ABONDANCE DE LA RÉCOLTE
Les recherches et les expériences du pomologue américain H. Hume ont éclairé et démontré avec certitude l'importance de cette question dans la culture du Kaki du Japon. Ainsi, Hume a démontré que la plupart des variétés, et en particulier les meilleures, ont fortement besoin de la pollinisation et n'assurent une récolte qu'à cette condition. S'il n'y a pas de pollinisation, il se produit une chute massive des fleurs et la récolte est insignifiante ou nulle. Des expériences et des observations de Hume, il ressort qu'il existe quelques variétés qui sont indifférentes à la pollinisation et qui donnent des fruits parthénocarpiques (sans pépins) en grand nombre. En outre, il se trouve des variétés qui, sans pollinisation, donnent toujours des fruits ; la fertilité de ces variétés est généralement très grande. En même temps, Hume a remarqué l'irrégularité de l'apparition des fleurs mâles et sa corrélation avec la productivité. Après cela, on comprend l'inconstance et l'intermittence de la production des fruits. Quand il y a eu beaucoup de fleurs mâles, la récolte est superbe ; quand il n'y a pas eu de fleurs mâles, la récolte est faible ou même nulle, sauf pour certaines variétés. La situation géographique de la plantation du Kaki a une influence sur la pollinisation. Dans les contrées humides, la pollinisation est plus nécessaire que dans les contrées demi-sèches ou sèches. Par exemple, en Floride, en de nombreux'endroits du Japon, à Batoum (au Caucase), il serait difficile de se passer de la pollinisation. Mais en Californie, dans la Chine du Nord, et dans la région méditerranéenne l'importance de la pollinisation n'est pas primordiale. Pour éviter l'irrégularité des récoltes, les américains ont introduit une variété spéciale, « Gailey », qui donne chaque année une grande quantité de fleurs mâles. Elle joue dans la plantation le rôle de variété pollinisatrice. Au Caucase, il existe une variété pollinisatrice locale : « Vvedenski ».
INFLUENCE DE LA POLLINISATION SUR LES PROPRIETÉS DES FRUITS
L'influence de la pollinisation se fait sentir, dans un groupe défini de variétés, sur la couleur et le goût de la chair. Il existe un groupe de variétés dont la chair, indépendamment de la présence ou de l'absence de graines, est toujours claire, c'est-à-dire jaune ou orangée et très souvent âpre. Ces fruits ne sont mangeables qu'à pleine maturité, quand ils sont mous. Il y a aussi des variétés dont la chair des fruits, si ceux-ci se sont développés sans pollinisation (fruits sans pépins), reste claire et âpre, tandis que les fruits issus de fleurs pollinisées (fruits avec quelques pépins) ont une chair sucrée et foncée. Ces fruits sont parfaitement mangeables à l'état de demi-maturité, quand ils sont encore bien fermes. Il n'a pas encore été constaté de variétés à chair foncée et sans pépins. La couleur foncée de la chair dépend de la quantité de pépins qui se sont développés, et celle-ci dépend de la quantité de pollen fournie par les arbres mâles. S'il ne se développe qu'une graine dans le fruit, la chair n'est que légèrement foncée, autour de cette graine. Dans ce cas, la partie foncée est sucrée même à demi-maturité, alors que la partie restée claire est âpre et n'est pas mangeable. S'il s'est développé deux graines réparties dans deux loges opposées, la chair prend une teinte entièrement foncée et devient sucrée, elle est tout à fait comestible même lorsque le fruit est à l'état vert. S'il se développe trois graines ou plus, toute la chair devient foncée, très sucrée, et les fruits sont mangeables, même fermes, avant leur complète maturité. De l'intensité de la pollinisation dépend le jaunissement et la saccharification partielle ou complète de la chair avec disparition de toutes traces d'âpreté dans les mêmes proportions. Dans le cas de pollinisation partielle ou faite dans de mauvaises conditions, les fruits auront une chair hétérogène, foncée et sucrée par places, claire et âpre ailleurs. Dans ce cas, la chair foncée et toujours nettement distincte de la claire. La pollinisation amène une modification, non seulement de la couleur et du goût de la chair, mais aussi de toute la consistance du fruit. Ainsi, dans certaines variétés, en l'absence de graines, la chair des fruits à maturité est de consistance gélatineuse, et dans les fruits avec graines, c'est-à-dire provenant de fleurs pollinisées, la chair est ferme. La pollinisation produit quelquefois des changements dans la forme et dans la teinte du fruit ; ainsi la variété « Hyakume » a des fruits qui diffèrent beaucoup de la forme typique pour un arbre donné. Dans cette variété, la couleur de la peau des fruits qui se sont développés sans pollinisation et sans pépins est jaune clair, mais chez les fruits provenant de fleurs fécondées, la peau est rouge carmin tirant sur le brun. De ce qui vient d'être exposé ressort l'importance des arbres pollinisateurs à fleurs mâles. C'est pourquoi dans la culture rationnelle et industrielle de cet arbre, il est nécessaire de toujours planter un arbre pollinisateur pour sept à huit arbres femelles, ou d'en insérer un greffon dans la charpente de la variété stérile. Il ne faut pas oublier que les arbres pollinisateurs fleurissent souvent avant les autres. Il faut choisir des variétés de pollinisateurs qui fleurissent en même temps que les variétés à polliniser.
Note de François Drouet : dans le développement ci-dessus, le professeur Evreinoff ne traite pas de la possibilité d'une indépendance entre la pollinisation et la non astringence des fruits. La classification actuelle des variétés de Diospyros kaki identifie et nomme PCNA (Pollination Constant Non Astringent) les variétés dont les fruits se mangent dès la maturité de récolte, durs, croquants comme des pommes, et dépourvus d'astringence
indépendamment du fait qu'ils soient pollinisés ou non. On peut les consommer pelés ou non. Ils ont un stade de consommation optimal.
Diospyros kaki : fruit d'une variété non astringente de type PCNA.
VARIETÉS
Les variétés de Diospyros kaki sont nombreuses. Au Japon seulement, on connaît plus de 800 variétés cultivées. Le nombre des variétés répandues en Chine est encore plus grand et voisin de 2.000. Le besoin d'une étude et d'une classification était donc naturel. La première classification a été proposée par les japonais il y a plus de cent ans. Elle était basée sur les qualités gustatives des fruits ; on classait toutes les variétés en deux groupes :
sucrées
et âpres (amères).
Cette classification est évidemment sans fondement car il existe des variétés qui, suivant que les fleurs ont été pollinisées ou non, donnent soit des fruits sucrés, soit des fruits âpres. Ces variétés appartiennent dans un cas au groupe des fruits sucrés, dans l'autre au groupe des fruits âpres. Le goût ne peut donc servir de base à la classification du Plaqueminier du Japon.
Diospyros kaki 'Hana Fuyu' (variété non astringente). La deuxième classification des variétés de Diospyros kaki a été proposée en 1914 par le pomologue américain Hume, qui a beaucoup étudié le Plaqueminier du Japon et découvert le véritable caractère de la pollinisation de cet arbre. La classification de Hume est basée sur le changement de couleur de la chair des fruits sous l'influence de la pollinisation. D'après cette classification, toutes les variétés sont partagées en deux groupes.
Variétés constantes (d'après Hume : « pollination constant ») : on classe dans ce groupe les variétés dont la couleur de la chair n'est pas modifiée quelle que soit la manière dont se sont développés les fruits, c'est-à-dire sans pollinisation (parthénocarpie), ou avec pollinisation. Et variétés variantes (d'après Hume : « pollination variant ») : à ce groupe se rattachent les variétés dont la couleur de la chair change sous l'influence de la pollinisation ; sans pépins, les fruits restent clairs et avec pollinisation et pépins, ils deviennent foncés. Diospyros kaki 'Jiro' (variété non astringente).
Une troisième classification, avancée par Miss J. Condit, en Californie, a modifié et complété la classification de Hume en 1919, en divisant chaque groupe en trois classes d'après la forme des fruits : coniques, ronds, aplatis. Diospyros kaki 'Õ-Gosho' (variété non astringente).
Une quatrième classification, basée sur la prise en compte des caractères botaniques, a été élaborée par le docteur Trabut à Alger, en 1921. D'après cette classification toutes les variétés se divisent en trois groupes :
représentants femelles,
représentants monoïques avec fleurs mâles,
représentants dioïques avec fleurs mâles exclusivement. Les deux premiers groupes sont divisés par le Dr Trabut en une série de groupes secondaires basés sur les relations des diverses variétés avec la pollinisation et sur la capacité de donner des fleurs mâles en plus ou moins grande quantité. La classification du Dr Trabut est faite en détail et épuise tous les groupements de variétés, mais elle est incommode au point de vue pratique. Diospyros kaki 'Lycopersicon' (variété astringente). Une cinquième classification, la plus pratique à notre point de vue, émane de M. Zaretski, pomologue russe qui a travaillé au Caucase. La classification de M. Zaretski, publiée en 1934, est une classification qui complète celles de Hume et de Condit. M. Zaretski, à l'intérieur de chaque groupe, divise toutes les variétés d'après la forme des fruits en quatre classes : fruits cylindriques, coniques, ronds, plats. Cette classification prend l'aspect suivant : variétés « constantes », à fruits cylindriques, coniques, ronds, plats. Et variétés « variantes », à fruits cylindriques, coniques, ronds, plats. L'abondance extraordinaire des variétés du Kaki ne permet pas de donner la description de toutes les variétés cultivées. Il est même impossible de donner la description des variétés les plus répandues. Il faut se borner à décrire quelques variétés typiques, et en même temps les plus précieuses. Variétés constantes, à fruits cylindriques : Tsuru - Fruit gros, cylindrique, allongé. Peau jaune-orange, fine mais ferme. Chair jaune-orangé, juteuse, de consistance crémeuse. Peu ou pas du tout de pépins. Maturité tardive : novembre-décembre. Nécessité de la pollinisation / Ormond - Fruit moyen, cylindrique, allongé, irrégulièrement côtelé. Peau rouge-jaunâtre. Chair orange foncé, charnue. Maturité tardive : décembre. Le fruit se conserve jusqu'en mars. A fruits coniques : Hachiya - Fruit gros ou très gros, conique, allongé. Peau rouge-orangé, fine, pointillée. Chair orangé-rouge, juteuse. Peu de pépins. Variété semi-tardive, à longue conservation. Nécessité de la pollinisation. / Tanenashi - Fruit gros, conique, symétrique. Peau orangé-rouge, fine. Chair jaune, plus foncée à l'intérieur, de consistance pâteuse, sucrée. Variété semi-tardive. Peut se passer de pollinisation. / Gailey - Fruit moyen ou petit, conique. Peau épaisse, jaune lavée de rouge. Chair juteuse, jaune brun. Variété semi-tardive, pollinisatrice remarquable, donne des fleurs mâles en grande quantité. A fruits sphériques : Niyo-Tan - Fruit moyen, sphérique, à peine aplati. Peau rouge-orangé. Chair d'un brun-rouge ou jaune clair, sucrée, à consistance de gelée. Variété précoce. A fruits plats : Gosho - Fruit gros, aplati, avec un renfoncement en haut et en bas. Peau fine, orangé-rouge. Chair jaune, brune à l'intérieur, à consistance de gelée. Maturité semi-tardive. / Tamopan - Fruits très gros. La forme du fruit est caractéristique, avec un sillon profond, transversal au milieu du fruit. Peau lisse, épaisse, orangé-rouge. Chair jaunâtre, transparente, juteuse. Maturité semi-tardive. Variété fertile, peut se passer de pollinisation. / Fuyu - Fruit assez gros, rond, aplati. Peau rouge tomate. Chair couleur saumon, épaisse, sucrée. Maturité tardive. Variété très fertile, n'a pas besoin de pollinisation, donne elle-même des fleurs mâles en quantité. / Triumph - Fruit moyen aplati, légèrement quadrangulaire. Peau jaunâtre passant à orangé-rouge foncé. Chair jaune-rouge, juteuse et sucrée. Maturité semi-tardive. Nécessité de la pollinisation. Variétés variantes, à fruits cylindriques : Tsuru-No-Ko - Fruit de grosseur variable, parfois petit, parfois gros, cylindrique. Peau orangé-rouge. Chair, dans les fruits sans pépins, jaune clair, dans les fruits avec pépins brun foncé. Variété hâtive. Nécessité de la pollinisation. A fruits coniques : Gejo-Gaki - Fruit moyen, conique. Peau rouge-foncé, épaisse. Chair : dans les fruits sans pépins, jaune transparente, dans les fruits à pépins, brune, charnue. Variété semi-hâtive. Nécessité de la pollinisation. A fruits sphériques : Hyakumé - Fruit gros ou très gros, de forme variable, tantôt sphérique, tantôt ronde aplatie. Peau rouge-orangé avec teinte brune, fine. Chair brune dans les fruits à pépins et jaune dans les fruits sans pépins, à consistance de gelée. Peut se passer de pollinisation, mais avec la pollinisation le goût est meilleur. / Zengi-Maru - Fruit petit, arrondi. Peau carminée, fine. Chair brune presque noire, très sucrée. Variété hâtive. N'a pas besoin de pollinisation. / Maru - Fruit moyen, sphérique aplati. Peau lustrée, orangé-rouge. Chair brun-orange, charnue. Variété tardive. N'a pas besoin de pollinisation.
A fruits plats : Eddo-Ichi - Fruit moyen, plat, parfois rond. Peau rougeâtre-orangé passant au brun-orange, épaisse. Chair brun-orange, charnue. Variété hâtive. N'a pas besoin de pollinisation, donne elle-même des fleurs mâles. / Yemon ou Emon - Fruit moyen, plat, côtelé. Peau orangé-rouge clair. Chair orangé, crémeuse, transparente. Variété tardive. Utilité de la pollinisation, bien qu'elle puisse s'en passer. Diospyros kaki 'Costata' (variété astringente). Note de François Drouet : depuis la rédaction de l'article en 1948, la classification des variétés de Diospyros kaki a évolué. La classification actuelle ne retient pas la forme du fruit. Elle prend en compte le caractère astringent ou non du fruit à la récolte, ainsi que l'influence ou non de la pollinisation sur l'astringence.
MULTIPLICATION
Le Kaki du Japon se multiple par semis, écussonnage ou par greffage. La multiplication par semis ne peut être recommandée car elle ne reproduit pas la variété dont proviennent les graines. En pratique, dans la culture du Kaki, on emploie l'écussonnage ou le greffage.
ÉCUSSONNAGE Dans la multiplication par écussonnage, on distingue : l'écussonnage d'automne à œil dormant, l'écussonnage de printemps à œil poussant. L'écussonnage d'automne du Kaki réussit mal. Le pourcentage ordinaire des reprises est de 10 %. Les mauvais résultats de l'écussonnage d'automne du Kaki s'expliquent par la difficulté de la soudure de l'œil avec le porte-greffe, à la suite de l'afflux rapide des matières tannoïdes de l'écorce. Le temps et les conditions de température ont une grande influence sur la réussite ou la non réussite de l'écussonnage. On obtient les meilleurs résultats de l'écussonnage d'automne si l'on observe les conditions suivantes : l'écussonnage doit être fait lorsque la sève s'est affaiblie sensiblement, ce qui se produit ordinairement vers la fin de septembre ; il faut écussonner le plus près possible de terre ; il est nécessaire de poser l'œil détaché le plus rapidement possible ; la ligature ne doit pas être serrée.
GREFFAGE La greffe donne de bons résultats. On emploie les greffes suivantes : en fente, en couronne, à l'anglaise ou en flûte. Les praticiens américains recommandent la greffe en flûte comme meilleur moyen de greffe du Kaki. Cette greffe se fait ordinairement très bas, à ras de terre ; pour éviter son dessèchement, on la butte souvent. Les praticiens russes recommandent de faire la greffe de printemps très tard, lorsque les bourgeons s'épanouissent et que les feuilles commencent à se développer. La durée de la période de greffage ne dépasse pas 12 à 15 jours. Quand le remplacement des variétés est nécessaire, on emploie la greffe en couronne. Par ce moyen, on peut modifier une plantation et remédier à l'absence, dans un jardin, d'une variété pollinisatrice.
Dans les régions à climat plus froid et dans les régions du Nord, on emploie pour la multiplication du Kaki la greffe d'hiver, que l'on fait en serre ou sous châssis chauds. La température du sol doit être régulière, et peut varier entre 20 et 25 °C ; la même température doit régner dans les serres. Le repiquage des greffes en pépinière ou dans les châssis se fait verticalement et non pas obliquement, et profondément de façon à ce qu'il ne reste qu'un œil à la surface. La greffe d'hiver se fait en mars (souvent en serre). Les soins donnés ensuite à la greffe peuvent être de deux sortes. Les greffes sont gardées dans la serre sans repiquage, sans être couvertes de châssis, jusqu'à la fin de l'automne où on les met en pépinière. Ou bien les greffes, après leur développement, sont plantées dans des pots. Note de François Drouet : Gilles Delugin, greffeur expérimenté, nous fait savoir qu'il utilise avec succès des pratiques de greffage novatrices pour le Kaki. Il souligne que les méthodes de greffe latérale autres que l'écussonnage (chip-budding, placage et coulée) ont révélé ces dernières années un intérêt certain pour le Kaki, par leur efficience et par leur possibilité d'utilisation avec tous les diamètres de greffons. Un panachage intelligemment agencé de ces méthodes sur un même porte-greffe peut d'ailleurs être conseillé pour optimiser la réussite du greffage (en particulier pour une variété extrêmement rare). Voir ci-après l'illustration d'un greffage multiple sur un seul sujet.
Diospyros kaki : greffage multiple, à gauche vue d'ensemble et à droite vue rapprochée.
Diospyros kaki : greffage multiple (détails).
CHOIX DES GREFFONS Les greffons pour l'écussonnage d'hiver doivent être prélevés 10 jours auparavant, et pas moins d'une semaine avant l'opération. Pour le greffage d'hiver, on prélève le greffon un mois d'avance. Pour le greffage de printemps et pour l'écussonnage, il faut prélever les greffons en janvier et pas avant. Les greffons préparés doivent être conservés dans un endroit frais dans du sable humide. Avant de commencer à préparer les greffons, en été, au moment de la formation des fruits, il faut bien choisir les branches des arbres mères qui portent des fruits. Ces branches doivent donner des fruits typiques de la variété et les plus beaux. Cette précaution est nécessaire parce que chez le Kaki, comme chez les Citrus, on constate souvent des mutations de bourgeons. Ce phénomène consiste en l'apparition de branches donnant des fruits qui diffèrent plus ou moins nettement des fruits typiques de la variété. Si l'on prend des greffons sur ces branches, on obtient de nouvelles variétés distinctes de l'arbre mère. Les mutations de bourgeons donnent, le plus souvent, des variétés plus mauvaises et peu productives ; c'est pourquoi leur multiplication est indésirable.
PORTE-GREFFES Le Plaqueminier du Japon (Diospyros kaki) se greffe sur trois espèces : Plaqueminier du Caucase (Diospyros lotus) ; Plaqueminier de Virginie (Diospyros virginiana) ; Plaqueminier du Japon (Diospyros kaki), sachant que cette greffe, dite sur franc, n'est généralement employée qu'au Japon.
CULTURE
EXPOSITION Pour la plantation du Plaqueminier du Japon, il faut choisir un endroit bien aéré et exposé au soleil, légèrement incliné vers le sud, sud-est ou sud-ouest. A l'ombre ou sur des pentes exposées au nord, les arbres sont de mauvais rapport. Mais il est nécessaire qu'ils soient abrités du vent bien que les fruits tiennent fortement à l'arbre ; sous l'effet du vent l'abondance des fruits peut causer le bris des branches.
SOL Pour le sol en général, le Plaqueminier du Japon n'est pas exigeant. En général, le Plaqueminier du Japon réussit dans tous les terrains à condition qu'ils soient perméables. Les meilleurs terrains sont les terrains profonds et même lourds, non secs, mais bien drainés, perméables. L'arbre ne supporte pas l'excès d'humidité et la stagnation de l'eau dans le sol. Dans ces cas, les fruits tombent avant maturité et, si le terrain est imperméable, l'arbre périt vite. Dans les terrains très légers, sablonneux, le rendement en fruits est faible.
PLANTATION (ÉPOQUE ET DISTANCE) Il faut planter soit au commencement de l'hiver, soit très tôt au printemps. Les meilleures époques pour la plantation sont de fin novembre à fin décembre ou de fin février à fin mars. Pour la plantation de printemps, l'arrosage est nécessaire. Il faut planter à une distance de 5 m x 5 m, soit 400 arbres par hectare. Pour certaines variétés dont la charpente est très étendue, comme « Hyakumé », il faut planter à 6 m x 6 m, soit 277 arbres par hectare.
SOINS A DONNER AUX ARBRES Le Plaqueminier du Japon en général n'est pas exigeant et n'a besoin d'aucun soin particulier ou distinct de ceux donnés à tous les arbres fruitiers, exception faite pour une opération dont nous parlerons par la suite. Il n'aime pas autour de lui un terrain en friche couvert d'herbes. C'est pourquoi il faut toujours travailler le terrain autour des arbres, le bêcher et le biner si la plantation n'est pas grande, le labourer si la plantation est considérable. Le meilleur engrais pour le Kaki est le fumier, qui doit être fourni à la même dose que pour les autres arbres. En l'absence de fumier, il faut avoir recours aux engrais verts (« cover crops »), en y ajoutant un engrais minéral. Il faut apporter des soins spéciaux aux arbres au moment où ils sont couverts de fruits : comme les branches sont lourdement chargées, elles risquent de se briser ; il faut placer sous les branches chargées de fruits, des barres de soutien, une dizaine sous chaque arbre. Le Plaqueminier du Japon, originaire d'une région à climat subtropical humide, a besoin d'humidité en grande quantité et est particulièrement sensible à l'humidité du sol. Mais l'excès d'humidité du sol provoque la chute des fruits. La sécheresse prolongée également, ou bien, ce qui se remarque souvent, les fruits ne mûrissent pas suffisamment et n'ont pas de valeur. C'est pourquoi, sous un climat sec ou s'il y a insuffisance d'humidité du sol, l'arrosage est nécessaire. L'arrosage est pratiqué dans toutes les régions de culture du Kaki où les pluies sont en quantité insuffisante. L'arrosage est fait avant le moment de la maturité des fruits. Après la cueillette des fruits, l'arrosage est complètement arrêté, mais il sera plus prudent de l'arrêter avant, notamment quand les fruits commencent à mûrir.
TAILLE La taille du Kaki n'a pas d'action sur la formation des fruits, car cette dernière dépend exclusivement des pollinisateurs. Note de François Drouet : sous climat français, les variétés dites parthénocarpiques, qui forment la quasi-totalité des variétés cultivées, produisent leurs fruits de façon abondante sans besoin de pollinisation. Fin de note. Cependant, si on ne taille pas l'arbre, il s'affaiblit prématurément ; les fruits deviennent plus petits, sont de peu de valeur, et l'arbre dépérit. Les fruits du Kaki, comme ceux du pêcher, apparaissent sur les coursonnes de l'année, et comme pour le pêcher, ces coursonnes annuelles ne portent pas de fruits une seconde fois. Sans taille, la formation des fruits se porte chaque année à l'extrémité des branches ; les branches se dénudent peu à peu et ne portent des fruits qu'à leurs extrémités. Les bourgeons terminaux donnent ordinairement des yeux à bois. Les boutons à fruits naissent du troisième au sixième œil à partir de la base du rameau. La taille du Kaki est analogue à celle du pêcher, avec cette différence qu'elle doit être plus longue parce que la plupart des boutons à fruits sortent à partir du quatrième œil et plus loin. La taille peut être effectuée en automne et au printemps. Le meilleur moment est aussitôt après la cueillette des fruits, ou même, pendant la cueillette.
RENDEMENT La productivité du Plaqueminier du Japon est considérable. Dans des conditions favorables et avec de bons pollinisateurs, une production de 100 à 150 kg par arbre suivant les variétés est courante.
CUEILLETTE Selon que les fruits sont destinés à la consommation sur place ou à être transportés dans des contrées éloignées, on procède de façons différentes. Pour la consommation sur place, les fruits doivent être cueillis le plus tard possible, à l'état d'entière maturité, lorsqu'ils ont perdu complètement leur couleur verte et ont pris leur couleur typique. Pour le transport, ils doivent être cueillis tout à fait fermes, et lorsqu'ils commencent à se colorer du haut du fruit jusqu'au milieu. Les fruits ne doivent pas être arrachés à la main mais coupés au sécateur. Le pédoncule doit être coupé assez court pour que, lors de l'emballage, il ne puisse pas abîmer les autres fruits. En cueillant à la main, on peut arracher le pédoncule du fruit car celui-ci tient plus fortement à l'arbre qu'au fruit. Le fruit sans pédoncule perd sa valeur commerciale, ne se conserve pas, ne supporte pas le transport et pourrit. La cueillette des fruits doit être faite avec de grandes précautions pour ne pas abîmer la peau du fruit et ne pas l'écraser. Les fruits abîmés pourrissent facilement. Les fruits destinés au transport doivent être parfaitement sains, entiers et fermes.
EMBALLAGE Pour les transports lointains, les fruits sont enveloppés dans du papier de soie, posés dans des cageots, comme les pêches, sur une couche de frisure sur un rang, rarement sur deux rangs. Les fruits sont posés le pédoncule en bas, debout.
CONSERVATION Les fruits du Kaki se conservent dans un fruitier quelconque, mais de préférence sombre. Dans un local clair, les fruits mûrissent plus rapidement. Suivant qu'on doit les envoyer plus ou moins rapidement sur le marché, le local sera sombre ou clair. S'il est possible de faire à volonté la lumière ou l'obscurité dans le local où sont conservés les fruits, ce sera encore mieux. Le local ne doit pas être très sec, car dans ce cas les fruits se rident et se dessèchent sans devenir mous et sans mûrir convenablement. La meilleure température pour la conservation des fruits dans un frigorifique est de 0 ° à 1 °C.
PARASITES ET MALADIES Il y a peu de parasites sur le Plaqueminier du Japon. Quelques-uns cependant causent de terribles dégâts. L'un des plus dangereux est Ceratitis capitata (cératite, mouche méditerranéenne des fruits, mouche de l'Oranger). Ceratitis capitata est une mouche de la grosseur de la mouche domestique, ou un peu plus grande, avec des ailes plus longues, d'aspect cireux, et des lignes transversales jaunes sur l'abdomen sombre. La mouche apparaît dès le commencement de l'été ou la fin du printemps, et dépose ses œufs sous la peau du fruit. De ces œufs sortent bientôt des larves très nombreuses qui envahissent la chair. Celle-ci se transforme en une masse foncée, brune, puante et pourrie. Les fruits sont immangeables. Note de François Drouet : sous le climat méditerranéen français, je constate que la piqûre de la cératite donne lieu à une gangue noire de 2 mm de diamètre sous la peau contenant de minuscules larves, qui reste localisée jusqu'à la maturité du fruit. Celui-ci reste consommable, si l'on prend soin d'éliminer la gangue noire avec la pointe d'un couteau. Fin de note. Il y a deux ou trois générations de mouches par été. La récolte du verger peut être entièrement détruite. La lutte est difficile. Les meilleurs résultats sont donnés par les pièges à mouches. On suspend sur les arbres des bocaux-pièges spéciaux, en verre, dans lesquels on verse soit de la bière avec de l'eau, soit de l'eau avec 25 % de vinaigre, soit de l'eau sucrée. Les mouches sont prises dans les bocaux. Tous les 3 à 4 jours, on examine les bocaux, on vide le contenu avec les mouches prises, et l'on remplit avec du liquide frais. Il faut aussi détruire tous les fruits qui ont été attaqués. La mouche des caves, Drosophila melanogaster, dépose des œufs entre le calice et le fruit. Le fruit se dessèche rapidement. La lutte est difficile. Les pièges, des bocaux de verre emplis de vin étendu de moitié d'eau, donnent certains résultats. Ce parasite n'apparaît en grandes quantités que dans les régions vinicoles. La cochenille, Diaspis pentagona, connue autrefois sur le Plaqueminier au Japon seulement, est apparue aussi en France. Les pulvérisations avec une solution faible d'arsenic ou de nicotine, mais sous forte pression, dès l'apparition du parasite, et la pulvérisation en hiver de lait de chaux avec 0,5 % de sulfate de fer, sont à conseiller. La maladie la plus dangereuse est la maladie du collet (crown gall des Américains), qui est provoquée par des bactéries (Bacterium tumefaciens). Aucun moyen radical de lutte n'existe encore. Les arbres attaqués par cette maladie commencent à jaunir. Les feuilles, les branches perdent leur teinte normale. Le mieux est de détruire ces arbres. Le sulfatage à la bouillie bordelaise à 2 % en hiver est la meilleure mesure préventive.
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